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All the characters are fictional.
5 juin 2010

Merde merde merde merde

Merde, j'ai déconné. Il est 5H08. Le soleil n'est pas encore levé mais il fait clair. Les oiseaux chantent depuis longtemps. Un train passe et la maison branle presque aussi fort que les quelques certitudes qu'il me restait. Un éclair de lucidité me traverse ou plutôt m'électrise l'esprit. Je m'allume une cigarette. J'ai l'impression d'être une de ces vieilles bagnoles, une carcasse, qu'on est en train de passer dans un compresseur pour en faire un cube de ferraille. Merde, j'ai déconné.

Je m'en étais remis à la fatalité, au destin, à mon essence, je pensais que j'étais programmé et qu'aucun de mes choix n'aurait d'incidence véritable sur qui j'allais être. Grossière erreur.

Je pensais être un héros de bande dessinée, celui qu'on suit en sachant qu'il allait s'en sortir, qu'évidemment, la fin était écrite et la façon de tourner les pages n'aurait de toute façon aucun effet sur le déroulement de l'histoire. Grossière erreur.

Je rêvais d'une existence sans regrets, absence justifiée d'un grand geste de la main et d'un désinvolte "bah...", qu'au fond, je n'aurais pu être personne d'autre. Grossière erreur.

Je pensais que la réalité n'avait aucune emprise sur moi, que j'échappais comme une savonnette des mains de l'expérience et du temps, qu'il n'y avait qu'à dégrossir un peu de cire pour atteindre une statuette d'ivoire. Grossière erreur.

Les regrets sont déjà là, avec une immense sensation de trop tard. Je n'ai plus le courage de douter, plus le courage de faire une connerie. Je ne suis qu'un lâche. Je me dégoûte. Je suis la quintessence de l'inutile. Le mec qui sert à rien.

Je pensais que si j'avais pu, j'aurais fait et que si j'avais pas fait, c'est que je pouvais pas. Grossière erreur.

Je n'ai même pas les couilles ou la naïveté de penser que si tout était à refaire, je ne le referais pas. Et c'est ça le pire, le plus horrible de toute cette histoire. Même avec mille chances, je ferais mille fois la même erreur. Pourquoi pourquoi pourquoi...

Quand mon grand-père me détaillait pour la centième fois le grand joueur de football qu'il aurait pu devenir, je riais doucement en pensant que s'il avait réellement été aussi bon dribbleur qu'il ne le racontait, il ne serait pas devenu fermier. Je perçois à présent la portée immense de cette vieille histoire et son retentissement dans mon présent.

Il doit exister une fracture, énorme, entre les gens qui deviennent et les gens qui regrettent. Et j'arrive encore à me consoler en me convainquant que cette fracture doit être programmée quelque part dans un gène. Le mot de trop, qui trahit toute ma pensée et m'éclate au visage en me brûlant les yeux. Cette pensée me conforte  surtout dans me nouvelle certitude, que je fais partie de cette deuxième catégorie de gens. Les inutiles.

Il ne me reste qu'une maigre consolation, celle de pouvoir pointer du doigt les autres et, dans un rire bruyant faire, faire jaillir la vanité d'une vie trépidante qui passera la même ligne d'arrivée que moi, le souffle juste un peu plus court.

Que faire maintenant?

Essayer de trouver un peu de sommeil dans le tiroir de ma table de nuit pour étudier mon cours de marketing demain.

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